samedi 31 décembre 2011

Public Image Ltd : Image Publique S.A.

Cette fois, on s'attaque à du lourd. Pensez-vous ! Le groupe fondé par John Lydon, en 1978, alors que, à peine quelques mois auparavant, ce dernier braillait dans le bateau ivre dénommé Sex Pistols. On reviendra à un autre moment sur ces derniers. Ce qui nous intéresse ici, c'est d'identifier ce moment où une frontière a été franchie, où de nouveaux horizons musicaux ont vu le jour.

P.I.L. : « a groundbreaking band ». Dès l'écoute du premier morceau du LP first issue, Theme, plus de neuf minutes de guitare tordue, basse pesante, assaisonnée de batterie qui pilonne le panorama, avec John Lydon et sa voix chargée en auto-malédiction, répétant à l'envi qu'il souhaite mourir (pour des raisons somme toute très ordinaires), nous sommes collés au fauteuil, les yeux grands ouverts, forcés de contempler l'athanor alchimique qui transmute le plomb et sa lourdeur en un or verdâtre chargé de fiel. Et ce n'est pas fini.

Un disque pareil ne sortirait pas de nos jours : trop de religion dans l'air, trop d'intolérance parée des vertus du langage raisonnable, de sa dialectique casseuse de briques, et qui met en avant le soit-disant respect pour entretenir l'odieux. La novlangue où liberté égale esclavage semble vivre son acmé.

Pour être sûr que chacun a bien compris le sens du texte, celui-ci est exprimé à haute et intelligible voix (Religion I). Ensuite, il est mis en musique (Religion II). Après écoute, eh bien, tout le monde a compris ! Après un tel moment de blasphème horrifique (bien que l'on soit loin de Georges Bataille tout de même !), mais salutaire, on repart avec Annalisa dans le marteau-pilon sans maître : le déchainement total. On est aplati par l'énergie et ce titre fait vraiment passer l'album des Pistols pour du vulgaire rock'n'roll ancré dans un passé totalement révolu ! Y aurait-il mieux que le chaos finalement ?

Les titres Public Image, Attack, Low Life, plus ramassés, envoient plus de fusées que les orgues de Staline sur Berlin : nous avons droit au focus nécessaire sur l’antagonisme Rotten/Lydon, et la mise plus bas que terre de Malcolm Mc Laren (jamais cité) part one, et part two. En fait, John Lydon nous dit : « Maintenant vous allez voir qui je suis ! ». Irréductible aux choix d'un manager mégalomane, je récupère tout : image, liberté de penser, possibilités créatrices... Et j'irai plus loin ! Et je survivrai ! (ce qu'il a finalement fait). Fodderstompf vient utilement rappeler que le groupe sait profiter des majors du disque, ah, ah !

En faisant équipe avec Keith Levene et Jah Wobble respectivement à la guitare et à la basse, Lydon a eu du flair : ceux-là trainaient avec lui depuis un petit moment déjà, et il a su les agréger dans son projet, bien que l'alliage soit assez instable... En effet, Wobble, bientôt, prendra son envol et sa basse ira conquérir d'autres territoires musicaux... Le troisième opus de P.I.L. viendra consacrer ce divorce.

Nous n'en sommes pas là : en 1978, l'album de P.I.L. first issue vient d'emblée de broyer les critères habituels appliqués à un disque de rock. The metal box prendra ensuite le relai et consacrera le parti pris de Lydon et consorts. Il y a ici un avant et un après. Et beaucoup ne s'en sont pas remis. Mais beaucoup ont aussi écouté, assimilé, et compris qu'il fallait désormais faire autre chose, pour réjouir nos ouïes !

T.-R.
 
Sources : fiables, comme d'habitude...




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