mercredi 22 août 2012

Kevin Coyne : le rasoir de Marjorie et ses manières abrasives

Banzaï ! Au sujet de Kevin Coyne, artiste anglais unique en son genre. Ah, une voix... Venue de nulle part dirait-on en première approche. De multiples notices parsèment la toile, et nous persuadent qu'il n'en est rien : sa vie, aux limites de la folie, ses goûts musicaux, ont poussé en ce sens. Tu fais avec la voix que tu as. Tu dis avec les mots que tu as glanés. Les chansons, elles n'ont rien perdu de ce côté abrasif et décalé...

Le double album « Marjory razorblade » n'est pas une partie de plaisir. Nous sommes loin des illusions des années soixante, et plus proche des névroses punk. Pas étonnant que Johnny Rotten, au grand dam de son producteur, ai passé du Kevin Coyne (Eastbourne ladies, 4e titre de la face 1 du double LP) lors de la seule émission de radio où il eut carte blanche pour la programmation musicale.

Pourtant Kevin Coyne, je ne peux pas dire que je le connais autant que ça... Je me souviens que le « Banzaï » qui retentit sur un de ses albums sorti dans les années 80 m'avait beaucoup impressionné : j'y sentais l'aliénation du travailleur à la chaine de chez Toyota, plus clairement exprimée que dans un tract syndical !

L'énergie désespérée et le regard ironique sur les choses et les êtres ? Eh bien, cela tombait plutôt mal au début des années soixante-dix, où la masse des auditeurs marchait sur les braises des utopies floues de la décennie précédente, ce feu qui allait s'éteindre. On a du dire à Kevin Coyne que sa musique, ses chansons, son attitude, étaient un peu décalées, pas assez dans le sens de la joie béate de rigueur, et que, commercialement, c'était le plongeon dans les abysses.

A l'heure où le folk et ses guitares sèches sont de retour, gardons-nous d'être béat : les visions du quotidien que Kevin Coyne projette sur le noir du vinyl sont nôtres. Elles n'ont pas quitté le monde que nous arpentons. Sa poésie touchait bien le cœur de la cible. Ce n'est pas fini.
 
Cette version de Marjory razorblade est boogie, décalée et …
Mais, ci-après, Banzaï est plus new wave, plus lisse et synthétique (1982 - LP "Politicz") ; totalement inquiétant, politiquement sans appel : la voix hésite entre cynisme et abandon... "Working in the factory..."